La nuit et les enfants de la nuit a été publié en 1996, conjointement par Cheyne et la librairie Ombres Blanches. Tirage HC de 300 exemplaires. Ce poème a paru également en préface à l’ouvrage de photos de Michel Séméniako : Le Domaine d’Abbadia (Marval, 1995), et dans Entre les lignes, mélanges offerts à Jiri Pechar (Philosophia, Prague, 1999).

 

 

Mais celui à sa table, et sa force gratuite ? Selon la vieille image du vide où il glissait enfant, son assise est la peur. Pourrait-on dire, sans elle, que rien habite le monde ? – Déjà, voici tombés comme des oiseaux sans ailes, tout un paquet d’aveux :

« Le langage va finir. Ce n’est pas un malheur parmi d’autres. Bien sûr que ça prendra des siècles : mais c’est la fin.

« Et même, il n’y aura plus d’archéologue penché sur des tessons. La pensée que la terre pouvait être le lexique d’une langue –  qu’il y avait un vrai, un faux, qu’il y avait des choses appelées « choses »  – déjà, n’est plus en lui.

« C’est donc la fin. Josué et ses guerres seront vus aussi lisses qu’une eau morte, et la dame au fichu, et les bateaux bénis.

« S’il faut courir vers le silence, alors, le voyageur sous sa casquette, le pousser dans le vent, debout sur le plateau, juste avant qu’il s’efface – avant le dernier signe.


« Oui, je veux bien qu’après il n’y ait rien de moi, comme l’eau se ferme sur un caillou. »

 
 
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